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29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 08:05
Vital KAMERHE, Président UNC
Vital KAMERHE, Président UNC

En République démocratique du Congo, l’opposition soupçonne le président Kabila de vouloir rester au pouvoir après la fin de son deuxième et dernier mandat présidentiel. Et notamment de chercher à faire glisser le calendrier électoral, au-delà de 2016, en imposant un recensement. C’est pourquoi plusieurs leaders de l’opposition avaient appelé à manifester lundi 12 janvier, manifestation qui avait tourné à l’affrontement. Vital Kamerhe, le président de l’UNC, est l’invité de Sonia Rolley.

RFI : Que reprochez-vous à ce projet de réforme de la loi électorale ?

Vital Kamerhe : C’est une stratégique que le président Kabila a trouvé quand il s’est rendu compte que l’opposition avait déjà déclenché une campagne qui avait été soutenue par les évêques et que la population était prête à marcher contre la révision de la Constitution. Il fait la loi électorale qui viole la Constitution parce que cette loi institue les recensements comme condition pour la tenue des élections provinciales législatives nationales et présidentielle. Je voudrais rappeler au président de la République l’article 73 de la Constitution qui dit que le scrutin du président de la République est convoqué 90 jours avant la fin de son mandat. Il n’y aura ni glissement ni un jour de plus ni un jour de moins. Les élections doivent se tenir 90 jours avant le 19 décembre 2016.

L’opposition est minoritaire à l’Assemblée. Comment pensez-vous vous opposer à l’adoption de ce projet de loi ?

L’hémicycle appartient au peuple congolais. Et nous disons donc, le peuple congolais, nous allons lui demander encore une fois, et la date sera communiquée ce soir pour que nous puissions descendre encore à l’Assemblée nationale. Qu’il vote ou qu’il ne vote pas, nous irons là-bas et si d’aventure il vote, nous allons changer de stratégie, nous allons tout simplement dire maintenant que Kabila dégage. Nous allons demander à la population congolaise, de partout, de s’occuper de tout ce qu’il y a comme symbole de Kabila. Donc, ce sera la fin du mandat de Kabila pour nous.

Mais le pouvoir dit que vous avez justement du mal à mobiliser, preuve que vos positions ne sont pas soutenues par la population. Que répondez-vous ?

Le pouvoir mobilise facilement et la garde républicaine et la police et l’infanterie contre une population qui n’est pas armée. Mais malgré ça, les images ne trompent pas. Les vaillants jeunes de Kinshasa sont venus braver les policiers. Il y a eu des blessés, il y a eu mort d’hommes.

Mais lundi lors de la manifestation, vous n’étiez que quelques centaines devant le Parlement ?

Ça, c’est vous et les radios qui avez dit ça devant le Parlement, mais il y avait un attroupement au niveau du rond-point Victoire, au niveau des sièges des partis. Qu’ils soient 300 ou 300 000, un million, c’est l’esprit. Aujourd’hui, les Congolaises et les Congolais, est-ce qu’ils veulent un troisième mandat pour Kabila ? Non.

On a vu que plusieurs rassemblements ou activités d’ailleurs de l’opposition avaient été empêchés par les autorités. Avez-vous tenté des recours par rapport à cela ?

Non, pour le moment, nous sommes déterminés à affronter les forces de l’ordre, à affronter Kabila et donc nous allons demander aux Kinoises et Kinois, au peuple congolais, de chasser la peur. Nous allons l’affronter parce qu’il s’agit pour nous à la fois d’appliquer l’article 23 de la Constitution et l’article 64 de la Constitution. Sur l’article 23 : nous devons jouir de notre liberté de manifester, de parler, d’aller et venir. L’article 64 : quand quelqu’un ou un groupe d’individus veulent exercer un pouvoir en violation de la Constitution, le peuple a le droit de les en empêcher. Et c’est ce que nous allons faire.

L’opposition reste toutefois morcelée. On a vu l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) par exemple ne pas se joindre à votre manifestation de lundi. Est-ce que ce morcellement qui existe encore au sein de l’opposition justement ne vous affaiblit pas ?

Non, je crois que Kabila nous a donné l’occasion de nous rassembler davantage puisque c’est la première fois qu’on a vu autant de leaders de l’opposition. Y compris les leaders de l’UDPS qui siègent au Parlement : Samy Badibanga, Fabien Mutomb étaient avec nous. Ils ont parlé et ils ont fait des déclarations. Etienne Tshisekedi demande le dialogue, mais Etienne Tshisekedi n’a pas dit que Kabila aura un troisième mandat en contrepartie du dialogue. Il ne faut pas qu’il fasse dire à Etienne Tshisekedi ce qu’il n’a pas dit.

Lors de ses vœux, Etienne Tshisekedi a renouvelé son appel à la communauté internationale pour qu’elle organise un dialogue national. La proposition vous paraît-elle pertinente ? Est-ce la priorité aujourd’hui ?

Non, je veux rappeler tout simplement à mon aîné Etienne Tshisekedi que lui-même après la proclamation des résultats, il a dit qu’on ne peut pas dialoguer avec Kabila puisqu’il ment comme il respire. C’est ça le problème. Même si Etienne Tshisekedi prête la bonne foi à Kabila, il est en train de se tromper à mon avis.

Le gouverneur de la province du Katanga, Moïse Katumbi, a pris ses distances avec le président Joseph Kabila. L’appelez-vous à rejoindre l’opposition ? Et pourrait-il être un candidat acceptable justement pour vous ?

Une chose à la fois. Tout ce que nous disons au gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, il a fait une déclaration qui rend compte de ce que nous avions déjà dit avant, pas de troisième mandat. Maintenant, il est l’objet d’injures à la télévision, de tracasseries de tout genre. Je lui dis : « Mon cher Moïse il est temps que vous puissiez dire au président Kabila, monsieur le président j’assume ma position. Je quitte la majorité présidentielle. Je vais dans l’opposition ». Et nous allons l’accueillir à bras ouverts.

Vendredi, cela fera quatorze ans que Laurent-Désiré Kabila a été assassiné, en 2002. Ils sont plus d’une centaine à être représentés devant une cour martiale pour ce crime. Beaucoup sont encore en prison alors qu’en 2013, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a statué sur ce cas estimant que les droits des condamnés avaient été violés, qu’un traitement inhumain leur avait été réservé et la Commission avait recommandé leur relaxe. Depuis rien. Qu’est-ce que le gouvernement devrait faire ?

D’abord, c’est une parodie de justice. Le gouvernement devait tout simplement relaxer ces gens-là. Les Eddy Kapend, les Leta Mangasa, les Nono Lutula, tous les jeunes gens du Sud-Kivu sont en train de moisir pendant quatorze ans comme ça en prison. Nous disons que c’est criminel de la part des autorités congolaises. Et le président de la République le sait très bien que Mzee (Laurent-Désiré Kabila, ndlr) m’appelait comme son fils, mais je ne dois pas pour autant accepter que les innocents continuent à croupir en prison. C’est l’occasion aussi d’exiger la libération du secrétaire général de mon parti, Jean-Bertrand Ewanga, qui a été arrêté injustement et de Diomi Ndongala, et du représentant de l’UDPS Bruno Kabatshi et de Mike Mukebayi, votre confrère journaliste qui a été arrêté pour tout simplement avoir donné son point de vue sur une question d’actualité.

Par Sonia Rolley

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